Un syndicat peut obtenir la réparation du préjudice résultant de l’atteinte portée à l’intérêt collectif des professions qu’il défend, même lorsqu’il n’établit pas l’existence d’un préjudice moral propre.
CE, 15 décembre 2021, n°443511
La CGT, la CGT-FO et l’Union syndicale Solidaires ont demandé la condamnation de l’Etat à leur verser la somme de 50.000 € à chacun en réparation du préjudice moral subi par les salariés dont elles défendent les intérêts du fait de l’absence de conformité du droit français au droit de l’Union Européenne s’agissant de la règlementation des congés annuels.
Le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande et la Cour administrative d’appel de Versailles a confirmé cette décision au motif que les syndicats requérants ne justifiaient pas de l’existence d’un préjudice moral qui leur serait propre.
Le Conseil d’Etat censure cette analyse dans les termes suivants :
« 3. Il résulte des dispositions précitées des articles L. 2131-1 et L. 2132-3 du code du travail que tout syndicat professionnel peut demander, devant le juge administratif, réparation du préjudice résultant de l'atteinte portée, du fait d'une faute commise par l'administration, à l'intérêt collectif que la loi lui donne pour objet de défendre, dans l'ensemble du champ professionnel et géographique qu'il se donne pour objet statutaire de représenter. En application de l'article L. 2133-3 du même code, il en va de même d'une union de syndicats, sauf stipulations contraires de ses statuts.
4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que, pour juger que les organisations syndicales requérantes n'étaient pas fondées à se plaindre du rejet de leurs prétentions indemnitaires par le tribunal administratif de Montreuil, la cour administrative d'appel de Versailles a retenu qu'elles n'établissaient pas l'existence d'un préjudice moral qui leur serait propre. En se fondant sur cette seule circonstance, alors qu'elles se prévalaient, ainsi que les dispositions citées ci-dessus y autorisent les syndicats professionnels et unions de syndicats, d'un préjudice qui aurait été porté à l'intérêt collectif des professions qu'elles représentent, dont il lui appartenait dès lors de rechercher s'il était caractérisé, la cour administrative d'appel de Versailles a commis une erreur de droit ».
L’affaire a ainsi été renvoyée à la Cour administrative d’appel de Versailles qui devra se prononcer sur le fond sur le droit à indemnisation.
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